La génèse de l’imprimante 3D
En 1983, Alain Le Méhauté, chercheur à Alcatel, fait de la recherche fondamentale sur la géométrie fractale. Mais ses collègues contestent ses équations. Le meilleur moyen de prouver qu’il a raison, c’est de fabriquer des objets fractals, c’est à dire “des objets dont les propriétés locales sont équivalentes à leurs propriétés globales”.
Par exemple, un gros cube plein de petits cubes qui ont la même structure que le grand cube.
Mais produire cet objet en 1983 était impossible, même avec une machine à cinq axes.
Il a une idée pendant un déjeuner à la cantine : «Il faut inventer une imprimante 3D pour les fabriquer.» Ça tombe bien, son voisin de table, Olivier de Witte, travaille alors sur les lasers à Cilas Alcatel, et quand deux lasers se croisent, on peut transformer un liquide (monomère) en solide (polymère).
Le concept de l’impression en trois dimensions est né.
Mais les premiers essais ne sont pas concluants. Jean-Claude André, directeur scientifique à l’Ecole nationale supérieure des industries chimiques (Ensic) de Nancy, leur propose alors d’arrêter de focaliser le laser en volume pour déposer des couches en surface, l’une après l’autre. Le monomère polymérise par focalisation et il y a une fusion avec la couche d’en dessous. Les trois chercheurs travaillent la nuit et le week-end avec quelques thésards du CNRS et parviennent finalement à imprimer un petit escalier en colimaçon.
Ils déposent un brevet pour le compte de Cilas Alcatel le 16 juillet 1984, soit trois semaines avant l’américain Chuck Hull.
Alors que la machine se perfectionne au fil des ans et qu’une trentaine de thésards du CNRS travaillent successivement sur le projet, les inventeurs découvrent que la Cilas a fait le ménage dans son portefeuille de brevets et a cessé de payer les frais nécessaires à son maintien.
Le CNRS aurait pu prendre le relais, mais a estimé que c’était “un truc de rigolo” : les trois compères abandonnent la bataille.
Pendant ce temps, Chuck Hull n’a aucune difficulté à trouver des investisseurs et crée son entreprise, 3D Systems.
Aujourd’hui, il est considéré comme l’inventeur de l’impression 3D et son entreprise est le leader mondial du marché.