Il s'appelait Henri.
Je voudrais vous faire part de quelques paroles et histoire qu'il nous racontait quand nous autres enfants, le supplions de nous raconter quelque chose de la guerre.
Mon grand père a fait la guerre de 14. Il est revenu avec 2 doigts en moins. Il était dans la cavalerie. J'avais une photo de lui sur son cheval, avec casque et sabre, mais je ne la retrouve pas. Son cheval s'appelait "Painsec".
Il ne parlait pas souvent de la guerre ou juste pour nous raconter des moments amusants.
Je me souviens qu'il nous avait raconté que le lieutenant piquait des crises pas possibles pour essayer d'apprendre aux soldats à marcher au pas.
Le problème, c'était que les soldats, en grande majorité issus de la campagne, étaient pour les 3/4 illettrés et ne connaissaient pas la différence entre droite et gauche.
Finalement, le lieutenant a trouvé une solution originale qui a très bien marché et en 2 temps et 3 mouvements, c'était appris.
Il leur a dit textuellement d'après mon grand-père:
"Imaginez que vous avez de la paille dans votre sabot droit et du foin dans votre sabot gauche".
Et au lieu de "droite, gauche, droite, gauche...", l'ordre de marche était:
"paille, foin, paille, foin..."
Lors des repas de famille, lorsque qu'il finissait une bouteille de vin, il disait toujours:
"Encore une que les chleux n'auront pas".
Mon père lui, qui a fait la guerre suivante et a été déporté, ne pouvait en parler sans avoir les larmes aux yeux en se rappelant tous ses compagnons qui étaient morts devant ses yeux.
Il a été si marqué qu'à l'hôpital, à la fin de sa vie, il voyait des allemands débarquer partout dans sa chambre...
Le patriotisme était poussé à un tel point que quand sa mère a appris la mort de son plus jeune fils, elle a eu cette parole terrible et regardant ses 2 autres fils (dont mon père):
"Lui au moins, il est mort pour sa patrie".